Certains obstacles freinent encore le transfert d’un établissement bancaire à l’autre, en particulier lorsque le client possède des placements d’épargne ou détient un emprunt immobilier.

Ce qu’il faut retenir

La loi n°2015-990 du 6 août 2015 dite loi MACRON vise à faciliter la mobilité bancaire des particuliers en introduisant un service gratuit et entièrement automatisé de changement de domiciliation de leurs prélèvements et de leurs virements récurrents.

Cette disposition est entrée en vigueur le 6 février 2017.

​CMF. art. L. 312-1-7

Conséquences pratiques

Seuls les comptes à vue des particuliers peuvent être gratuitement et rapidement transférés d’un établissement bancaire à l’autre.

Le service d’aide à la mobilité bancaire ne bénéficie pas aux placements d’épargne, dont le transfert n’est pas toujours gratuit, ni même possible.

Pour aller plus loin

Mobilité bancaire

Depuis le 6 février 2017, les clients particuliers peuvent changer gratuitement de banque, sans avoir à réaliser eux-mêmes les démarches relatives au changement de domiciliation de leurs prélèvements et de leurs virements récurrents.

De manière générale, les banques doivent informer leurs clients des services de mobilité offerts en mettant à leur disposition une documentation gratuite, sur papier ou sur un autre support durable, dans leurs locaux et sous forme électronique sur leur site Internet.

Le service de mobilité proposé par l’établissement d’arrivée doit être gratuit et sans conditions. Par un accord formel, le client autorise la nouvelle banque à réaliser en son nom le transfert des opérations de prélèvements valides et de virements récurrents du compte d’origine.

Des délais sont imposés aux parties prenantes au transfert, de manière à assurer une mobilité bancaire sous un délai maximum de 22 jours ouvrés :

  • A compter de l’accord donné par le client, 2 jours sont accordés à l’établissement d’arrivée pour solliciter l’établissement de départ.
  • Une fois sollicité, l’établissement de départ dispose de 5 jours pour transférer les informations relatives aux mandats de prélèvements valides et aux virements récurrents.
  • À réception des informations, l’établissement d’arrivée doit communiquer sous 5 jours les coordonnées du nouveau compte aux émetteurs de prélèvements valides et de virements récurrents.
  • Les émetteurs de prélèvements et de virements disposent à leur tour de 10 jours pour prendre en compte ces modifications et informer le client.

La banque de départ est tenue d’informer gratuitement le client, par tout moyen approprié et dans un délai de 3 jours ouvrés de la présentation de prélèvement, virement ou chèque sur le compte clos. Cette obligation d’information perdure durant une période de 13 mois suivant la clôture du compte.

Sanction du manquement à la procédure légale

Le législateur a prévu que « l’établissement d’arrivée ou de départ indemnise sans délai le titulaire de compte de tout préjudice subi, résultant directement du non-respect des obligations lui incombant dans le cadre de la procédure de mobilité bancaire prévue au présent article ».

Un établissement bancaire mis en cause pourra toutefois s’en exonérer « en cas de circonstances anormales et imprévisibles échappant à son contrôle, dont les suites auraient été inévitables malgré tous les efforts déployés, ou lorsqu’il est lié par d’autres obligations légales spécifiques ».

CMF. art. R 312-4-4

Exclusion des clients professionnels

Le service d’aide à la mobilité bancaire ne bénéficie qu’aux comptes de dépôt ou comptes de paiement détenus par les personnes physiques n’agissant pas pour des besoins professionnels.

Aussi, les comptes professionnels ou les comptes de personnes morales (sociétés, associations) sont exclus de la procédure de mobilité.

Transfert des placements d’épargne

Les placements d’épargne ne bénéficient pas du dispositif d’aide à la mobilité bancaire. Si certains peuvent être transférés dans la nouvelle banque, moyennant des frais de transfert, d’autres ne peuvent faire l’objet que d’une clôture suivie d’une ouverture dans la nouvelle banque.

– Livret A, livret de développement durable et solidaire (LDDS) et livret d’épargne populaire (LEP)

Du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011, les transferts de livret A étaient possibles entre 2 réseaux bancaires selon les modalités fixées par l’arrêté du 4 déc. 2008. Depuis le 1er janvier 2012, la procédure de transfert n’est plus en vigueur.

Les établissements de crédit doivent s’assurer du respect du principe selon lequel une personne ne peut pas être titulaire de plus d’un livret A (décret du 4 oct. 2012, n° 2012-1128). Selon les termes du décret, le client détenteur d’un livret A qui souhaite en ouvrir un dans un autre établissement a le choix entre « confier à la banque le soin de faire les démarches pour fermer l’ancien ou s’en charger lui-même ». L’ouverture du nouveau livret est subordonnée à la présentation de l’attestation de clôture émanant de l’établissement où l’ancien livret était ouvert. Le transfert d’un livret A est donc exclu.

L’impossibilité de transfert s’applique de la même façon aux autres livrets règlementés, tels que le livret de développement durable et solidaire (LDDS) et le livret d’épargne populaire (LEP).

– Plan d’épargne logement (PEL) et Compte épargne logement (CEL)

Le PEL et le CEL sont transférables en l’état, c’est à dire qu’ils permettent à leur titulaire de conserver les avantages acquis dans le précédent établissement. En acceptant le transfert, le nouvel établissement s’engage à assurer l’intégralité des droits attachés au produit d’épargne logement.

Cependant, le transfert d’un PEL ou d’un CEL n’est pas nécessairement gratuit. Des frais de transfert peuvent être retenus par l’établissement d’origine. Ces frais ne doivent toutefois pas s’imputer sur le plan lui-même et le titulaire doit en avoir été informé au moment de l’ouverture du compte.

– Plan d’épargne en action (PEA)

Un PEA peut être transféré d’un établissement à un autre, sous la condition que le transfert réalisé porte sur l’ensemble des actifs. Le transfert du plan peut cependant entraîner des frais de transferts, point qu’il convient d’étudier avant d’initier le transfert.

Sous réserve du respect de certaines conditions, ce transfert n’entraine pas de clôture du plan ou de retraits (ne générant ainsi pas de fiscalité) et ne présente pas d’incidence sur ses caractéristiques fiscales (notamment au niveau de sa date d’ouverture ou de l’exonération des produits capitalisés).

BOI-RPPM-RCM-40-50-60

Le médiateur AMF a cependant relevé un certain nombre d’obstacles au transfert des PEA.

– Plan d’épargne retraite populaire (PERP) / Madelin

L’adhérent d’un PERP a la possibilité, pendant la phase d’épargne, de transférer ses droits sur un autre PERP (liberté de choix de l’organisme gestionnaire et des modalités de gestion). Le contrat transféré prend fin. Les capitaux issus de celui-ci subsistent et sont transférés sur le nouveau plan.

Ce transfert n’est pas assimilé à un dénouement du plan. Cette opération est neutre sur le plan fiscal.

Les contrats Madelin doivent comporter une clause de transférabilité (C. ass. art. D 132-7). Ce transfert peut donner lieu au prélèvement de frais dans les conditions définies au contrat. Toutefois, l’indemnité perçue par l’assureur d’origine ne peut dépasser 5 % de la provision mathématique du contrat, et doit être nulle à l’issue d’une période de dix ans à compter de la date d’effet du contrat (C. ass. art. R.331-5).

Les droits individuels en cours de constitution dans le cadre d’un contrat Madelin sont également transférables vers un contrat article 83, un contrat « exploitant agricole » ou un PERP (C. ass. art. L.143-2).

– Contrat d’assurance-vie

Les caractéristiques juridiques du contrat d’assurance-vie, reposant sur le mécanisme de la stipulation pour autrui, ne permettent pas d’envisager son transfert d’un assureur à l’autre.

La transférabilité des contrats rachetables a fait l’objet de plusieurs propositions de loi restées vaines. Une réponse ministérielle du 21 janvier 2014 a confirmé la position de l’administration fiscale en matière de transférabilité.

Situation du client détenteur d’un crédit immobilier

Le crédit immobilier souscrit auprès d’un établissement ne peut faire l’objet d’un transfert dans un autre établissement. Seul un rachat négocié auprès de la nouvelle banque est envisageable. Dans cette hypothèse, il faudra s’assurer de l’intérêt économique de l’opération, en particulier au regard l’indemnité de remboursement anticipée (IRA) due à la banque de départ.

En l’absence de rachat, l’existence d’un crédit immobilier dans la banque de départ ne constitue pas, en soi, un frein à la mobilité bancaire. Néanmoins, il est fréquent qu’une clause de domiciliation des revenus ait été négociée, à titre de contrepartie commerciale, lors de la signature du crédit immobilier.

La Commission des clauses abusives (CCA), chargée de détecter les clauses abusives insérées dans les contrats proposés aux consommateurs et aux non-professionnels, s’est prononcée sur la pratique des clauses :

  • Prévoyant que l’emprunteur ouvrira obligatoirement un compte à vue chez le prêteur, ce dernier étant autorisé de façon permanente à débiter le compte de l’emprunteur du montant des sommes exigibles.
  • Stipulant que l’emprunteur s’oblige à domicilier ses revenus auprès du prêteur, quelle que soit leur nature ou leur origine (salaire, pension, etc.), pendant toute la durée du prêt.

Selon la CCA, ces clauses peuvent être qualifiées d’abusives au sens de l’article L 132-1 du Code de la consommation lorsqu’elles sont sanctionnées par la déchéance du terme, alors même que l’emprunteur aurait toujours satisfait à ses remboursements.

Il en va de même des clauses selon lesquelles l’emprunteur est tenu, pendant toute la durée du prêt de verser l’ensemble de ses revenus sur un même compte dans l’établissement du prêteur lorsque cette obligation n’est accompagnée d’aucune contrepartie individualisée au profit de l’emprunteur.

CCA, Recommandation Prêt Immobilier, n°04-03

Cette Recommandation a une simple valeur d’avis. Néanmoins, la CCA pourrait être saisie par un juge à l’occasion d’une instance. Dans cette hypothèse, la banque qui opposerait une clause de domiciliation abusive pour faire échec à la mobilité bancaire de son client s’exposerait au rejet de sa prétention.

Cependant, les clauses de domiciliation insérées dans les contrats de prêt prévoyant une contrepartie individualisée au profit de l’emprunteur paraissent échapper à la qualification de clause abusive. Le manquement de l’emprunteur pourrait emporter l’application de la sanction prévue dans le contrat (par exemple, une majoration du taux d’intérêt).

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